L’interprétation comme traduction, candidature Europhilosophie 2011-2013

Le travail instrumental  rentre dans la catégorie de la traduction intersémiotique[1], puisqu’elle est une traduction du signe en son. Pourtant, on parle toujours d’interprétation pour définir cet acte. Il est donc légitime de chercher à comprendre pourquoi on emploie de ce terme.

Pour cela il est nécessaire d’aller au cœur du phénomène auquel il se réfère. Il faut donc décomposer le processus pour aller à son essence même. L’interprétation musicale est une chaîne de transmission et de transformation de l’idée musicale allant du compositeur au public en passant par l’interprète. Il y a donc plusieurs manières d’étudier le problème : adopter un regard extérieur pour analyser comment se transmet l’idée, rentrer dans l’intériorité du phénomène par le biais du regard du compositeur, de l’interprète, ou du public. L’interprète étant au cœur du phénomène dans la mesure où c’est lui le traducteur, ou l’interprète, où c’est grâce à lui que deux éléments qui ne partagent pas le même monde peuvent rentrer en contact, c’est son point de vue que nous adopterons[2]. Son travail consiste à prendre possession d’une partition écrite par un compositeur, et de la travailler pour offrir à un tiers la possibilité d’y accéder. Le phénomène se déploie donc à partir de deux réalités : l’incommunicabilité des deux entités qui sont aux deux extrémités de la chaîne, et la porosité aux deux « milieux » et donc le double savoir-comprendre de l’interprète. A partir d’un seul point d’origine, l’interprète, il y a alors une double tension : vers le compositeur à travers le texte, vers l’auditeur à travers l’expression instrumentale. Décomposer le phénomène pour rendre raison de l’utilisation du terme « interprétation » c’est donc se tourner dans les deux directions non pas de manière séparée mais à partir de leur condition de possibilité commune : la réception de l’idée par l’interprète.

Notre recherche suivra la question directrice suivante : pour rendre raison de l’emploi du terme d’interprétation faut-il mettre de côté l’idée de traduction ?

 

Tout d’abord il faut chercher en quoi le terme de « traduction » peut-être dépassé par le phénomène musical. Il convient donc d’étudier en premier lieu la « partition » qu’il s’agit de traduire ou d’interpréter. Goodman la définit comme « un caractère dans un système notationnel »[3] dont la notation a pour particularité d’être « complexe », « commode » et « commune aux utilisateurs de nombreux langages verbaux différents» et dont le système général se divise ensuite en « sous-systèmes notationnels »[4]. Il s’agit d’un système notationnel dans la mesure où « la plupart des caractères d’une partition musicale, qu’il s’agisse de chiffres ou de lettre ou ni l’un ni l’autre, sont syntaxiquement disjoints et différenciés. »[5]. La prescription est donc relativement précise et son domaine d’application relativement étroit ; relativement dans la mesure où il y a une marge d’imprécision. Chaque indication peut en effet recouvrir un champ d’application variable. Pour le constater il suffit de penser à la notion de caractère et aux indications comme presto, con passione. Il n’y a pas de fréquence rythmique invariable qui corresponde à ses notions, ni un exemple universel d’expression de la passion qui servirait de référence pour établir des points de comparaison entre différentes exécutions. De plus, ce qui paraît le plus exact et objectif présente le même type de difficultés de compréhension. En effet, l’indication de la note elle-même a une application variable. En ce qui concerne un instrument comme le piano par exemple, il n’y a pas de différence entre un do bécarre et un si dièse alors qu’ils correspondent à deux sons différents au violoncelle puisque c’est l’interprète qui produit la note en exerçant une pression du doigt sur la corde. L’application de la prescription est d’autant plus difficile avec ce type d’instrument que la justesse est une notion relative : « jouer juste » ne signifie pas jouer selon le nombre de comas exacts. On peut malgré cela dire qu’il s’agit d’un système « commode » dans la mesure où il contient des règles d’organisation précises facilement compréhensibles. Le système donne principalement trois types d’informations : la hauteur de la note, le rythme, et la couleur du son. La hauteur de note se situe dans le système classique[6] sur des portées. Elle se détermine en fonction de celles-ci et de l’armure à laquelle on peut ajouter des symboles du dièse qui augmente la valeur, et du bémol qui la diminue. Le rythme se situe à l’intérieur de mesures qui forment elles-mêmes une phrase. Il est déterminé par le graphisme de la note ; la valeur la plus longue est la note « carrée » qui est ensuite divisée de manière régulière. Enfin, la couleur du son est indiquée par la modalité, la tonalité[7], et les indications de caractères. Pour terminer nous pouvons dire que ce système a également l’avantage d’être indépendant des langues naturelles et donc potentiellement compris par tous ceux qui peuvent le lire et connaissent la culture musicale dans laquelle il s’est formé. Ces informations sur le fonctionnement du système nous permettent de conclure que les prescriptions contenues par la partition sont des normes vagues[8]. Ce sont des normes parce qu’elles prescrivent des comportements aux individus en se référent à un idéal, et que leur efficacité se fonde sur une communauté de valeur qui garantie la possibilité d’adhésion du sujet. Mais elles sont vagues parce qu’à cause d’une insuffisance dans l’énoncé, mais également du fait qu’elles indiquent une réalité floue, elles permettent l’existence de cas-limites. Leur application est donc fondée sur un principe de tolérance[9] à savoir qu’il est possible d’accepter une variété de possibilités qui, par applications successives, pourraient pourtant donner naissance à un non respect de la norme. Mais s’il y a prescription de normes c’est qu’il y a un champ d’application précis dans lequel elles doivent être respectées.

Ce champ d’application est celui de l’instrument auquel le texte s’adresse par l’instrumentation. Plusieurs marqueurs indiquent à quel instrument se destine le texte : le titre (Suite pour violoncelle seul par exemple), le nombre de portées, la clef dans laquelle c’est écrit (pour le violoncelle on utilise la clef de fa, d’ut quatre, et de sol)… C’est l’instrumentation qui permet au compositeur de définir le timbre, le registre et le mode de jeu qu’il désire obtenir. Il peut ainsi transmettre ce que l’on pourrait appeler la « morphologie » de l’idée. Bien sûr, il est possible de lire n’importe quelle partition dans sa tête ou par la voix, de la solfier sans respecter l’instrumentation. Reste qu’il ne s’agit que d’un exercice qui ne tient pas compte de toutes les prescriptions que contient le texte. La traduction musicale du signe en son a donc cela de particulier qu’il y a une adresse du texte à une traduction précise, et donc que le mode de traduction fait intégralement partie de l’idée elle-même[10]. En principe il ne devrait donc pas y avoir de hiatus entre le monde de la partition et le monde de la traduction mais plutôt une correspondance exacte. En effet, si l’idée est dirigée vers sa traduction cela suppose que, conscient de la transformation que va subir l’idée dans le passage du signe au son, le compositeur va chercher à atténuer les défauts qui pourraient arriver lors de la traduction du signe au son, et augmenter les possibilités données par l’instrument[11]. De fait, dans beaucoup d’œuvre on cherche à mettre en valeur l’instrument. On peut penser notamment aux concertos pour lesquels un instrument est mis en avant par rapport à l’orchestre, et où cette adresse de la partition à sa traduction est généralement palpable.

Théoriquement l’idée devrait donc s’épuiser dans sa traduction puisqu’elle est dirigée vers elle. Dans son ouvrage Sur la traduction, Ricoeur met en lumière une « présomption de non-traduisibilité » inhérente à toute traduction[12]. Il s’agit d’une insuffisance essentielle du monde d’accueil par rapport au monde de départ. Dans notre cas précis elle ne devrait plus exister puisque le texte est dirigé vers sa traduction. Or, il y a dans l’interprétation musicale une difficulté à traduire, à dire ce qui est inscrit. Est-ce que c’est parce que le monde d’accueil, celui de l’expression instrumentale, est insuffisant par rapport au monde de départ, celui de la partition ? La traduction serait alors vouée à l’échec. Si l’on remonte au principe du processus on remarque qu’il y a toujours une traduction originaire qui consiste à consigner l’idée sur papier : c’est une constante inhérente à l’acte créateur. C’est là que se situe la présomption d’intraduisibilité dans le sens où l’écrit est impropre à recevoir parfaitement l’idée. C’est ce que veut dire Casals lorsqu’il affirme que « l’âme d’un chant ne pourra jamais être mise sur papier »[13]. S’il y a une insuffisance du monde d’accueil par rapport au monde de départ, c’est donc du papier par rapport à l’idée et non pas du monde ouvert par l’expression instrumentale par rapport au monde ouvert par la partition. Entre deux mondes d’une richesse infinie il y a un monde insuffisant qu’il est nécessaire de traverser : celui du texte. Il faut donc aller au-delà de la pauvreté de l’écriture, et viser l’idée à travers le texte qui est en la trace. On peut donc parler de l’interprétation musicale comme d’une traduction, non pas de la lettre, mais du sens. Il faut traduire un au-delà de la partition, un contenu qui transcende le contenant, un contenu qui est symbole.

Le contenu de la partition peut dans son ensemble être considéré comme symbolique si l’on retient que les caractéristiques du symbole sont : obscurité, stimulation, verticalité, hauteur, pluri dimensionnalité, constance, et relativité[14]. Il y a obscurité dans la mesure où son intérêt va au-delà de la dimension intellectuelle ou esthétique. Il y a stimulation dans la mesure où il a une résonnance sensible chez celui qui le déchiffre qui peut ainsi vivre grâce à lui une modification intérieure. Il y a verticalité dans la mesure où il y a création de rapports imaginatifs, extra-rationnels, entre faits, c’est-à-dire dans notre cas l’action du sujet qui joue, objet c’est-à-dire l’instrument, le jeu, et signe, c’est-à-dire l’inscription de la partition. Il y a hauteur dans le sens où le symbole constitue ici une ouverture vers l’infini, ce qui n’est pas explicable par le concept, descriptible par le verbe. Il y a pluri-dimensionnalité dans le sens où le symbole condense plusieurs faces, formes, sens, interprétations. Il peut faire sens de plusieurs manières selon la culture dans laquelle il est rendu efficace, selon le sujet chez qui il trouve une résonnance, sa forme elle-même se prêtant à la multiplicité des interprétations. Il y a constance dans la mesure où, comme nous le soulignions plus haut, le symbole est indépendant des cultures dans lesquelles il est rendu efficace, le rapport entre le symbolisant et le symbolisé demeure quelque soit la situation temporelle ou géographique. C’est sans doute cette constance qui fait l’efficacité de ce système de notation musicale qui, d’après Goodman, n’a d’équivalent[15]. Enfin, malgré cela il y a relativité dans la mesure où le symbole peut être perçu de manière différente selon le contexte dans lequel il se trouve, mais aussi le vécu du lecteur, son histoire, et son intention. C’est donc parce que son contenu est symbole que la partition suppose une compréhension possible du récepteur et une culture commune qui lui permet d’être efficace. L’efficacité n’est donc pas contenue dans l’objet mais dans la réception de l’objet par le sujet. L’efficacité de l’original est donc acquise lors de la traduction, et c’est là le fondement de la particularité de la musique. La traduction comprend donc une interprétation du contenu symbolique.

 

Analysons à présent le moment de la réception de l’idée. Dans la pratique musicale, cette réception se fait par le biais de l’instrument. C’est à lui que le texte s’adresse, et c’est donc à lui de donner son amplitude au texte : c’est un outil de traduction. L’outil est selon Heidegger un « quelque chose pour… »[16], il renvoie à autre chose et il implique un comportement pratique. C’est un « être à portée de main ». Ici, l’instrument sert à obtenir un son et il doit être utilisé par l’instrumentiste. Mais il a tout de même une spécificité. Si l’on prend l’exemple de traduction d’un texte, le traducteur a un crayon comme outil de traduction. Si son crayon change de matière, de couleur, ou même qu’il change d’outil et qu’il utilise une craie par exemple, cela n’a aucune incidence sur le contenu de sa traduction. En revanche, si le musicien utilise un mauvais instrument, ou un instrument d’excellente qualité, il y a un impact direct sur la traduction. Dans la traduction musicale la qualité de l’outil est donc partie intégrante de la qualité de la traduction. Mais il ne suffit pas pour autant d’avoir un bon outil pour donner une bonne traduction. Certes l’outil a une valeur en soi, mais ce qui a le plus d’importance c’est la valeur ajoutée que lui donne l’artiste qui l’utilise. Le travail se fait en effet par l’outil mais également et surtout sur l’outil. Pour que l’instrument soit dirigé vers autre chose il est nécessaire que l’instrumentiste soit dirigé vers lui. Ainsi, les conditions pour obtenir une bonne traduction sont d’avoir un bon outil et de posséder en plus un savoir-faire solide.

Ce savoir-faire est d’abord une capacité technique d’usage de l’instrument. Cela consiste à apprendre les mouvements des plus simples aux plus compliqués pour permettre l’exécution d’une phrase musicale[17]. Il s’agit pour cela de vaincre des mouvements naturels de résistance du corps[18] qui se crispe lors du contact avec l’outil[19]. Chaque instrumentiste doit donc  apprendre une série de gestes conventionnels qui ont été légué par telle ou telle tradition, mettre à l’épreuve leur efficacité, et les adapter à sa propre morphologie[20] afin d’augmenter la sûreté du geste, son efficacité, et sa rapidité. La technique est donc essentiellement adaptation : adaptation du corps au geste, et du geste au corps. Voici ce que Lorenz nous dit du phénomène d’adaptation : « Le processus qui modèle l’organisme de telle façon qu’il coïncide avec son milieu […]. L’adaptation est toujours la preuve irréfutable que ce processus a eu lieu. Toutes les fois qu’un organisme se modèle sur son milieu, le processus en court ressemble tout à fait à ce qui se passe quand, dans la structure organique, il se forme une image du milieu ; il est donc parfaitement correct de dire que l’organisme a acquis une information sur le milieu. »[21]. Posséder une bonne technique instrumentale est donc la preuve que  l’instrumentiste coïncide avec le milieu, ici l’instrument lui-même. Si l’apprentissage est si long, c’est qu’il y a un temps nécessaire pour que l’instrumentiste mûrisse dans un nouveau milieu. Cela se produit au cours d’une modification fondamentale ; la rapidité d’acquisition de la technique instrumentale dépend donc de la capacité du musicien à se modifier en profondeur. Lorenz note ensuite deux seules possibilités d’adaptation : « la première est l’interaction entre l’individu et son milieu. Dans ce processus c’est l’espèce qui, au moyen de la mutation et de la sélection, produit l’adaptation qui permet la survivance »[22], dans cela on peut retrouver toute la chaîne des procédés techniques qui ont été essayés, utilisés, puis abandonnés au profit d’autres plus efficaces ; « la seconde […] est l’interaction entre l’individu et ce qui l’entoure. […] Subjectivement parlant, leur fonction est accompagnée, si tout se passe bien, par l’expérience de la conscience. Ils produisent très souvent une acquisition, et ils en sont fréquemment la condition sine qua non. […] Les processus dont nous parlons ici adaptent instantanément  le comportement aux exigences du milieu à un moment donné ; ils ne modifient pas le mécanisme de la réaction, mais sont eux-mêmes la fonction des mécanismes hautement différenciés »[23]. Le second processus accompagne la traduction de manière constante puisqu’elle est en fait la capacité de l’instrumentiste à réagir dans l’instant en tenant compte de ce qui vient de se produire et de ce qui est à venir, ce qu’il veut produire. Ils permettent notamment de se corriger dans l’instant. La technique est donc une condition qui précède et accompagne la traduction musicale. Elle est à la fois universelle et particulière dans le sens où elle est applicable à tous à condition d’être adaptée à chacun. Par là même elle devient à la fois transmissible et intransmissible. Il y a ainsi assimilation c’est-à-dire transformation de l’autre en même afin qu’il soit efficace. Mais la technique n’est pas une fin en soi. En effet, comme la définit Xavier Gagnepain, elle est « l’art et les moyens de ne pas trahir le projet »[24]. Elle recouvre donc deux réalités : le savoir-faire, et le savoir-concevoir. Le savoir faire sans le savoir concevoir est aveugle, et le savoir concevoir sans le savoir faire est vide.

Dans l’interprétation musicale vue comme une traduction, savoir concevoir se fait à partir du texte. La prise de contact avec le texte se fait au cours de trois moments que l’on peut distinguer logiquement : la lecture à vue, la lecture répétée, et la lecture experte[25]. La lecture à vue est une opération de conversion dans l’instant qui a trois dimensions : une dimension auditive (j’entends la note que je lis), une dimension théorique (je sais où se situe la note sur l’instrument), et une dimension pratique (je sais la jouer). Cependant, l’expression lecture à vue, ou bien déchiffrage, recouvre deux réalités : le premier contact avec la partition, et l’exercice académique de conversion dans l’instant qui consiste à prendre possession d’un texte au fur et à mesure qu’on le lit (donc qu’on le joue) en sachant en restituer directement le maximum d’informations pertinentes. La deuxième étape est la lecture répétée. Il s’agit de décortiquer le texte et d’en travailler dans le détail chaque partie en suivant généralement la méthode efficace suivante : je joue, j’entends une erreur, je m’arrête, je corrige, je recommence le motif jusqu’à ce que le passage étudié soit fixé. Chaque répétition est ensuite « transférable »[26]  c’est à dire qu’elle facilite la répétition dans une autre partie de l’œuvre, voire même dans une autre pièce. Il s’agit donc d’une action dynamique dans laquelle le progrès, le changement, se fait par la répétition du même. C’est donc un exercice souple, rendu possible par la rigueur de la méthode fondée sur l’habitus[27], la puissante injonction intérieure qui consiste à s’arrêter lorsque le mouvement, le son, ou autre n’est pas bon. Enfin, il y a la troisième et dernière étape, idéal peut-être jamais vraiment atteint de l’exécution experte dont Sloboda dit que : « C’est atteindre un haut niveau d’habileté par le déploiement simultané de toutes ces compétences, en les soutenant et en les subordonnant à la structure d’ensemble d’une composition musicale »[28]. Elle nécessite ensuite plusieurs choses : a) « connaissance des groupements ou des patterns à grande échelle au sein de la musique qui contrôlent l’exécution »; b) « le contrôle hiérarchique est entretenu par des procédures extrêmement flexibles pour résoudre des problèmes locaux »; c) « l’expert a les moyens de contrôler adéquatement sa propre exécution et de prendre une initiative corrective avant qu’il ne dévie trop grossièrement du projet »[29] Il en conclut : « Le monitoring adéquat n’est pas tant une question d’écoute qu’une connaissance de ce à quoi il faut prêter l’oreille »[30]. L’expert a donc une connaissance approfondie à la fois du texte et de sa structure, du tout et de la partie. Il sait également contrôler les difficultés instrumentales liées au texte. Enfin, il est à la fois tourné vers le texte et vers sa propre exécution, ce qui le rend capable d’avoir une écoute ciblée.

Cette lecture lui permet ensuite de pouvoir concevoir une véritable pensée musicale. Cette pensée musicale a deux versants : elle provient du texte, et se dirige vers le texte. C’est précisément cette constatation qui nous amène à passer de la dimension traductive à la dimension interprétative. Il y a interprétation à partir du moment où il y a prise de liberté dans le savoir concevoir. Le problème qui se pose est alors celui des limites. La première hypothèse que l’on peut faire est de dire que c’est le contenu du texte lui-même qui donne des limites. Or, on ne peut pas savoir de manière objective dans quelle mesure il y a respect, ou non respect du texte. Le problème demeure toujours celui des cas limites et de l’acceptabilité de certaines interprétations. Le texte ne suffit donc pas à limiter la traduction. On peut donc émettre une deuxième hypothèse selon laquelle la limitation se fait au cours de l’autre mouvement, celui qui va du musicien au texte. Cela soulève alors le problème de l’éthique de la traduction. Berman souligne le danger d’un type de traduction qu’il appelle la traduction appropriation[31] qui se fait selon la « logique du même ». Pour lui au contraire, « l’acte éthique consiste à reconnaître et à recevoir l’Autre en tant qu’Autre »[32]. Mais à partir du moment où le travail se fait dans l’intériorisation, on peut se demander comment se fait cette préservation de l’altérité dans la mêmeté. Pour Berman elle doit être « manifestation d’une manifestation »[33], révélation de ce qui se révèle. Il s’agit donc de laisser l’autre apparaître en tant qu’autre, et l’accueillir dans son intimité comme autre. Ainsi le montre Gadamer lorsqu’il affirme dans Vérité et méthode : « Même dans la situation extrême où l’on doit traduire d’une langue dans une autre, on ne peut guère séparer la « chose » de la langue. Seul le traducteur qui exprime la « chose » que le texte lui montre, c’est-à-dire qui trouve une langue qui ne soit pas seulement la sienne, mais encore la langue appropriée à l’original, saura vraiment le rendre […]. Ainsi la situation du traducteur est au fond la même que celle de l’interprète. […] Tout interprète est traducteur. »[34]. Pour cela il est nécessaire d’accepter cette distance qu’il y a entre le texte, et celui qui le lit, distance qui peut être historique, mais qui est en fait toujours déjà distance de l’objet qui se présente au sujet.

Pour Levinas cette distance est maintenue malgré l’intériorisation lorsqu’il y a relation de jouissance parce que « toute jouissance est une manière d’être mais aussi une sensation, c’est-à-dire lumière et connaissance. Absorption de l’objet mais distance à l’égard de l’objet »[35]. Ainsi, c’est en ayant un rapport sensitif au contenu du texte, que le sujet peut maintenir cette altérité nécessaire dans ce savoir-concevoir. Il y a alors au cours de sa lecture connaissance et lumière. Le texte est éclairé par celui qui le lit et l’étudie. Il se manifeste dans sa lumière parce qu’il est éclairé avec intelligence. Ainsi la lumière révèle ce qui était déjà là : « Elle est ce par quoi quelque chose est autre que moi, mais déjà comme s’il sortait de moi. Il n’a pas d’étrangeté foncière, sa transcendance est enrobée dans l’immanence. »[36]. C’est de cette relation de jouissance que provient la luminosité du véritable savoir-concevoir qui a su conserver l’altérité au cœur de la mêmeté dans un acte éminemment éthique.  Mais Levinas continue en affirmant : « C’est avec moi-même que je me retrouve dans la connaissance et dans la jouissance. L’extériorité de la lumière ne suffit pas à la libéralisation du moi captif. »[37]. C’est à ce point de la réflexion qu’il est nécessaire de rappeler la particularité de la traduction musicale. Dans la mesure où elle est expression, elle vient justement affranchir le moi, le libérer de sa captivité. La lumière donne ici directement naissance à une réalité transfigurée. La traduction ainsi comprise peut alors se faire appeler manifestation de l’autre en tant qu’autre, révélation, dévoilement, interprétation. Ainsi se justifie l’emploi communément accepté du mot « interprétation » pour parler de la traduction musicale. Après l’anéantissement de la vie de l’idée dans la froideur du papier, un nouvel élan est donné par l’expression qui suit le mouvement d’absorption de l’objet par le sujet. De nouveau l’idée retrouve sa liberté. Consignée sur le papier elle n’appartenait plus au compositeur, interprétée elle n’appartient plus à l’interprète. Ainsi peut-on parler d’une résistance même de l’idée par rapport à toute appropriation. Par sa vocation même qui la porte à devoir être exprimée pour faire sens, elle est appelée à être toujours libre. En ce sens on peut dire que seule la relation éthique accomplie la véritable vocation de l’idée.

 

 

Il s’agit ensuite de savoir exprimer ce qu’on a compris. Pour cela, l’interprète vise une coïncidence toujours plus grande entre la compréhension qu’il a de l’idée, qui s’est logée dans son intériorité sous la forme d’une écoute intérieure, et la réalisation. L’écoute intérieure est fondamentale dans la mesure où elle est le point névralgique de la rencontre de l’idée avec le sujet, le point où l’on peut contrôler le degré d’absorption de l’idée. C’est elle qui permet donc l’expression et il n’y a donc pas d’expression de l’idée sans passer par elle. Il peut pourtant y avoir exécution sans présence de cette écoute intérieure. Mais il ne s’agit alors que d’une exécution, et non une expression ; c’est-à-dire d’une simple réalisation mécanique de ce qui est écrit sans transition par l’intime du sujet. Ainsi, c’est la présence de l’écoute intérieure et le fait que le musicien s’y réfère dans son travail instrumental qui fait toute la différence entre ce que Leibowitz nomme « exécutions correctes » et « exécutions vivantes »[38]. Elle est donc à la fois point de départ, et point de contrôle de l’expression de l’idée dans l’interprétation. Dans la mesure où elle naît de la relation de jouissance, elle n’est ni un concept construit par la raison auquel on se réfèrerait par la pensée, ni une émotion à laquelle on se réfèrerait en essayant de la revivre, ni une image crée par l’imagination à laquelle on se réfèrerait par la pensée. Pourtant, on peut lui faire correspondre un concept, on peut aussi dire que tel ou tel passage est triste, on peut également faire correspondre un paysage à une phrase musicale. Il est même nécessaire de faire ce travail. Ainsi l’exprime Casals : « L’artiste est imagination et fantaisie ; tandis qu’il se donne à la musique il doit éprouver et voir quelque chose, si vague, si indéterminée soit cette vision »[39]. Cependant, cela reste insatisfaisant. Il y a en effet quelque chose de nouveau dans la transformation en son, qui vient enrichir de nouveau l’écoute intérieure. Elle est donc le noyau de ce qui peut ensuite s’exprimer incomplètement par le concept, l’émotion ou l’imagination. De même que l’idée ne trouve jamais sa parfaite réalisation lorsqu’elle est consignée dans le papier, l’écoute intérieure ne trouve jamais sa parfaite réalisation lorsqu’elle est interprétée, consignée dans un son. Ainsi le travail du musicien à la saisir est-il infini. Cette incapacité à  pouvoir l’exprimer pleinement donne alors lieu à cette insatisfaction propre à la création : on peut même dire que plus elle est riche, plus l’insatisfaction est grande. Il faut donc chercher à nouveau. Casals exprime cette réalité en ces mots : « comment atteindre une interprétation vivante, si ce n’est en effectuant une re-création à chaque nouvelle exécution de l’œuvre ? Les feuilles des arbres apparaissent chaque année avec le printemps, mais d’une année sur l’autre ces feuilles ne sont jamais pareilles »[40].  Chaque fois qu’il re-travaille une œuvre, le musicien doit effectuer une re-création, un travail de re-naissance, une nouvelle manifestation, une nouvelle interprétation.

On peut alors se demander s’il est possible de faire une vérification de ces différentes interprétations pour savoir quand elles trahissent et quand elles illuminent la vérité de fond du texte. On trouve alors une richesse dans la forme même du contenu de partition. En effet, parce qu’il est symbole, il doit être possible de retrouver dans l’expression du symbole, l’original dans toute sa complexité. C’est là le principe de réversibilité qui ne fonctionne pas dans le texte littéraire[41] mais qui est tout à fait valable au niveau musical. On doit pouvoir faire ce retour à la notation vague avec toute la précision et l’ouverture qu’elle présentait originellement. L’éthique du traducteur doit pouvoir rendre possible une identification des deux éléments. Ainsi, sans s’épuiser dans la partition, même transfigurée dans l’interprétation, l’idée doit pouvoir retourner à la pauvreté essentielle du texte.  Mais hormis ce critère qui est uniquement fonctionnel, l’acceptation d’une interprétation comme bonne interprétation est en fait toujours donnée par le sujet. L’interprète est le premier juge de son propre travail. C’est lui qui le premier contrôle s’il y a adéquation de ce qu’il fait au texte, s’il reproduit bien la hauteur de note, le rythme, et la qualité du son qui est demandé. L’essentiel du travail est d’ailleurs fondé sur une capacité à juger de son expression. Cependant, il ne peut y avoir de véritable interprétation dans le solipsisme d’un travail solitaire. Il est donc nécessaire de soumettre ce qu’on fait à un tiers. Comme l’explique Frédéric Borsarello, le tiers est en fait multiforme[42] : des parents plus ou moins bienveillant, au public plus ou moins compétent, au jury en passant par le professeur, il s’agit à chaque fois d’un contrôle différent et enrichissant. Plus il est qualifié, plus il sera ensuite à même de poser son jugement. Chaque étape soumet l’interprète à la peur fondamentale du jugement d’autrui qui le rend vulnérable, mais le porte en fait à plus d’exigence et de sûreté de soi. En mettant à l’épreuve son expression, l’interprète soumet à la fois sa compréhension, l’intimité même de celle-ci, et sa capacité à éclairer à la fois ce qui lui a été confié et ce qu’il a dans les replis intimes de son être. Le mode de vérification de la qualité de l’interprétation se fait donc par autrui, et c’est ainsi grâce à lui que l’interprète gagne une véritable liberté. En ce sens il s’agit d’une mise à l’épreuve libératrice.

Il demeure qu’au cours du processus qui a conduit l’idée à son expression il y a une démultiplication des manifestations de cette idée. D’unique qu’elle devait être, elle devient multiple, et multipliable à l’infini. On peut alors se demander s’il y a eu une déperdition de sens au fur et à mesure du processus. En effet, comment concevoir cette multiplication sans y voir également une dissémination, un dispersement du sens et donc, une trahison ? Nous avons parlé de la traduction en disant qu’elle était toujours interprétation. C’est l’interprétation d’une chose, unique, préexistante à toute interprétation et néanmoins indissociable d’elle. Il y a donc un lien profond entre ce qui est interprété et son interprétation que Pareyson exprime en ces mots : « la vérité est toujours interprétée et […] toute interprétation est interprétation de la vérité ».[43] On peut donc en déduire que s’il y a interprétation c’est qu’il y a une vérité de fond du texte. Celle-ci, pour être, doit être dite. Il y a donc une pauvreté intrinsèque de la vérité de l’idée musicale. Mais c’est cette fragilité même qui pourtant peut faire sa force. « Peut », parce qu’il peut toujours y avoir de mauvaises interprétations qui viennent la trahir, l’abîmer, la travestir. Elle n’est alors plus que vérité bafouée. Mais en même temps, cela signifie qu’elle peut potentiellement être absorbée puis exprimée et donc illuminée par chacun selon ce qu’il est, et ce qu’il est à plusieurs moments du temps. Sa pauvreté même donne alors aussi au sujet la possibilité de la faire éclater dans une lumière unique et chaque fois différente.

 

Ainsi ne peut-on pas opposer, ni même distinguer la notion de traduction et celle d’interprétation dans l’acte musical. Les deux termes désignent en fait deux mouvements complémentaires qui doivent se nourrir l’un de l’autre pour que le musicien donne naissance à une exécution vivante. La notion de traduction est pourtant toujours première puisqu’il s’agit de chercher à transmettre quelque chose, à quelqu’un. Il est donc nécessaire de pouvoir refaire sans cesse ce passage de l’un à l’autre que l’idée de traduction suggère. Pourtant, il n’y a pas non plus de traduction sans interprétation. La pauvreté du texte par rapport à l’idée qu’il symbolise est en effet telle qu’il est nécessaire d’aller au-delà, vers l’idée, par l’interprétation. Ainsi l’interprétation vient-elle combler un manque. Cependant, sans une éthique qui vient donner raison de l’interprétation, il y a un risque de trahison de l’idée. C’est donc seulement en conservant l’altérité de la chose au cœur du même que l’on rend possible dans l’expression une interprétation qui remplisse les conditions nécessaires pour parler de la traduction. Ainsi va-t-on de la traduction à l’interprétation, et de l’interprétation à la traduction. Ainsi le musicien-traducteur est-il nécessairement interprète, et l’interprète doit-il avoir toujours l’exigence d’un traducteur. La condition de possibilité de ce double mouvement est alors donnée par l’essence de la chose même : la vérité de fond du texte. C’est sa force inépuisable qui rend nécessaire à tout musicien d’être traducteur et donc interprète, interprète et donc traducteur.

 

 

 

Bibliographie :

–          BERMAN, Antoine, La traduction et la lettre ou l’auberge du lointain, Paris, Seuil, 1999.

–          CORREDOR, Juan-Maria, Conversations avec Pablo Casals, Paris, Albin Michel, 1955.

–          CARNAP, Rudolf, The logical syntax of language, London, Open court classic, 2002.

–          ECO, Umberto, Dire presque la même chose, expérience de traduction, Paris, Grasset, 2006 (Coll. Le livre de poche, Traduction Myriem Bouzaher).

–          GADAMER, Hans-Georg, Vérité et méthode, Paris, Seuil, 1996, deuxième édition.

–          GOODMAN, Nelson, Langages de l’art, Paris, Hachette, 1990 (Pluriel, Trad. J. Morizot).

–          Heidegger, Martin, Être et temps, Trad. E. Martineau, Edition hors-commerce, 1985.

–          HUMBOLDT von, Wilhelm, Sur le caractère national des langues, Paris, Seuil, 2000.  

–          HUSSERL, Edmund, Méditations cartésiennes, Paris, Vrin, 1947, 2001 (Bibliothèque des textes philosophiques.

–          JAKOBSON, Roman, Essai de linguistique générale, Paris, Les éditions de minuit, 1963.

–          LEIBOWITZ, René, Le compositeur et son double, Paris, Gallimard, 1986, deuxième édition, (Tell).

–          LEVINAS, Emmanuel, De l’existence à l’existant, Paris, Vrin, 2004, seconde édition augmentée (Bibliothèque des textes philosophiques).

–          LEVINAS, Emmanuel, Le temps et l’autre, Paris, PUF, 1983 (Quadrige).

–          LORENZ, Kondrad, Evolution et modification du comportement, Paris, Payot et rivages, 2007 deuxième édition, (Trad. L. Jospin).

–          MAINE DE BIRAN, De l’aperception immédiate, Paris, Le livre de poche, 2005 (classiques de poche)

–          MERLEAU-PONTY, Maurice, Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 2006 (Tell).

–          PAREYSON, Luigi, Verità e interpretazione, Milano, Mursia, 1971.

–          RICOEUR, Paul, Sur la traduction, Paris, Bayard, 2004.

–          RAVAISSON, Félix, De l’habitude, Paris, Allia, 2007.

–          SADAI, Yizhak, Traités de sujets musicaux, Paris L’harmattan, 2003 (L’Itinéraire).

–          SLOBODA, John A, L’esprit musicien, La psychologie cognitive de la musique, Bruxelles, Mardaga, 1985.

 

Bibliothèque secondaire :

–          ALEXANIAN, Diran, Complete cello technique, The Classic Treatise on Cello Theory and Practise, Mineola, New-york, Dover publications DC, 2003.

–          DUMETT, Michael, Frege : Philosophy of language, London, Harward University Press, 1973 (Second edition).

–          GAGNEPAIN, Xavier, Du musicien en général…au violoncelliste en particulier, Paris, Cité de la musique, 2003.

–          PERNOO, Jérôme, L’amateur, Paris, Le fond des coulisses, 2009.

 

Entretiens :

–        Entretiens avec Frédéric Borsarello, professeur de violoncelle au Conservatoire Charles Munch (75011), publiés prochainement dans la revue de l’Association Française du Violoncelle, Le violoncelle.

–        Entretiens avec Xavier Gagnepain, professeur de violoncelle au Conservatoire National de Région de Boulogne-Billancourt, publiés prochainement dans la revue de l’Association Française du Violoncelle, Le violoncelle.

–        Travail en cours avec Atty Lengyel, figure majeure de l’école de piano hongroise de la deuxième partie du 20ème siècle, auparavant concertiste et pianiste dans le trio Lengyel, actuellement professeur au Conservatoire Russe de Paris Serge Rachamninov (75016) et au Conservatoire à rayonnement départemental de Montreuil.

 



[1] Voir les travaux de JAKOBSON, Roman, Essai de linguistique générale, Paris, Les éditions de minuit, 1963.

[2] Etant interprète nous-même, c’est également l’analyse que nous sommes le plus à même de vérifier et de faire vérifier.

[3] GOODMAN, Nelson, Langages de l’art, Paris, Hachette, 1990 (Pluriel, Trad. J. Morizot), p.217

[4] Ibid, p. 225

[5] Ibid, p.221

[6] Nous n’aborderons pas le problème des nouveaux systèmes utilisés dans la musique dite « contemporaine ».

[7] Nous n’étudierons pas le cas des musiques atonales.

[8] En ce qui concerne les travaux sur les expressions vagues se rapporter aux travaux de Frege, et particulièrement à l’ouvrage de DUMETT, Michael, Frege : Philosophy of language, London, Harward University Press, 1973 (Second edition).

[9] Sur la notion de principe de tolérance se rapporter aux travaux de Carnap, CARNAP, Rudolf, The logical syntax of language, London, Open court classic, 2002.

[10] Nous n’étudierons pas le cas de la transcription qui, par transposition, change la morphologie même de l’idée.

[11] C’est d’ailleurs ce désir du compositeur de faire passer son idée par un instrument précis, quitte à modifier l’usage classique pour y parvenir qui a mené à l’usage de la pique au violoncelle par exemple.

[12] RICOEUR, Paul, Sur la traduction, Paris, Bayard, 2004,  p.10

[13] CORREDOR, Juan-Maria, Conversations avec Pablo Casals, Paris, Albin Michel, 1955, p.246.

[14] CHEVALIER, Jean et GHEERBRANT Alain, Dictionnaire des symboles. Mythes, rêves, coutumes, gestes, formes, figures, couleurs, nombres Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1982, p. XIV-XVII, XXVIII.

[15] GOODMAN, Nelson, Langages de l’art, Paris, Hachette, 1990 (Pluriel, Trad. J. Morizot), p.220.

[16] Heidegger,Martin, Etre et temps, Trad. E. Martineau, Edition hors-commerce, 1985, paragraphe 15, p.73.

[17] D’après le professeur F. Borsarello il faut à peu près cinq ans pour consolider un socle technique.

[18] En ce qui concerne la notion de résistance du corps dans l’effort, se rapporter aux travaux de Maine de Biran, De l’aperception immédiate. Paris, Le livre de poche, 2005 (classiques de poche).

[19] Les épaules montent alors qu’elles devraient être détendues donc basses, le coude gauche reste près du corps au lieu de monter pour permettre une plus grande amplitude du geste, le bras droit lorsqu’il tire l’archet fait un mouvement de l’avant vers l’arrière au lieu de se déplier dans le prolongement du coude, les deux mains se crispent et le pouce exerce donc une pression sur le manche et sur la baguette au lieu d’être un simple soutien. Le mouvement de démanche se fait ensuite en montant les épaules et en descendant « en crabe » alors qu’il devrait suivre le naturel déploiement du bras à partir du coude. Cf. Annexe 1.

[20] La largeur des mains la taille des doigts, la longueur des bras, la force des muscles font qu’il est nécessaire pour chacun de trouver sa propre façon de combattre les défauts qui lui sont naturels.

[21] LORENZ, Kondrad, Evolution et modification du comportement, Paris, Payot et rivages, 2007 deuxième édition, (Trad. L. Jospin), p17-18.

[22] Ibid, p 18.

[23] Ibid, p 18-19.

[24] Entretien du 04.12.2010

[25]SLOBODA, John A, L’esprit musicien, La psychologie cognitive de la musique, ,Mardaga, 1985, p.97 et suivantes

[26] SLOBODA, John A, L’esprit musicien, La psychologie cognitive de la musique, , Mardaga, 1985, p129.

[27] Nous comprenons la notion d’habitus telle que la formalise Ravaisson dans De l’habitude, Paris, Allia, 2007.

[28] SLOBODA, John A, L’esprit musicien, La psychologie cognitive de la musique, LiègeBruxelle , Mardaga, 1985, p132

[29] Ibid., p143-4.

[30] Ibid., p144.

[31] BERMAN, Antoine, La traduction et la lettre ou l’auberge du lointain, Paris, Seuil, 1999, p.75

[32]Ibid, p.74.

[33] Ibid, p.76.

[34] GADAMER, Hans-Georg, Vérité et méthode, Paris, Seuil, 1996, deuxième édition, p 409

[35] LEVINAS, Emmanuel, Le temps et l’autre, Paris, PUF, 1983 (Quadrige), p. 46.

[36] Ibid, p.47

[37] Ibid, p. 47.

[38] LEIBOWITZ, René, Le compositeur et son double, Paris, Gallimard, 1986, deuxième édition, (Tell), p.52

[39] CORREDOR, Juan-Maria, Conversations avec Pablo Casals, Paris, Albin Michel, 1955, p.262

[40] Ibid, p. 263.

[41] ECO, Umberto, Dire presque la même chose, expérience de traduction, Paris, Grasset, 2006 (Coll. Le livre de poche, Traduction Myriem Bouzaher).

[42] Entretien personnel avec le musicien.

[43] PAREYSON, Luigi, Verità e interpretazione, Milano, Mursia, 1971, p. 53 : «  della verità non c’è che interpretazione e […] non c’è interpretazione che della verità ».