Le chant intérieur comme vie, journée avec la revue ALTER, Paris février 2012
D’une part la vie est notre grande conseillère,
et d’autre part, pour un artiste,
et particulièrement pour un exécutant,
atteindre une création vivante
constitue le problème essentiel.
Pablo Casals
Introduction.
- Comment le chant intérieur s’installe-t-il dans la vie de la conscience ?
- La temporalisation qui donne vie.
- L’unité successive comme déploiement du cycle naissance-vie-mort.
- Le « sens » comme forme du chant intérieur.
- Comment y est-il présent ?
- Le chant intérieur comme vie perceptive.
- Distinct du donné mondain mais aussi de l’ego.
- Il ne peut y avoir absence de chant intérieur.
- Quelles caractéristiques peut-on déduire de cette appartenance à la vie de la conscience ?
- Indéterminé avec une structure de détermination.
- Il y a plus dans le chant intérieur que dans la partition.
Conclusion.
Le travail que nous allons vous présenter portera sur la notion de « chant intérieur » appelée aussi par les instrumentistes « audition interne »[1], « pensée sonore »[2], « résonnance »[3].
Dans le monde de la pratique musicale le chant intérieur désigne la manière propre dont un instrumentiste se représente l’œuvre qu’il est en train de lire, ou de travailler à partir d’une partition, et qu’il transmet grâce son instrument lors de l’exécution. L’effectivité du phénomène, et son originalité sont clairement perceptibles lors d’écoutes comparées de différentes interprétations d’une même œuvre[4]. En effet, on constate grâce à cette expérience qu’il peut y avoir une grande diversité d’interprétations justes du même texte. Mais d’où vient cette diversité, et en quoi transmet-elle quand même la même chose ? A travers ce questionnement d’ordre herméneutique on voit se profiler un autre type de questionnement, cette fois-ci d’ordre phénoménologique. En effet, la réponse à ces deux questions ne peut venir que d’une étude approfondie de ce qui est la source du problème : le phénomène du chant intérieur. Généralement défini par la manière dont il se constitue – l’appréhension du texte par le sujet, ou dont il s’actualise – la manifestation mondaine de cette appréhension, il convient de s’arrêter sur ce que le phénomène est en soi pour le comprendre en profondeur. Pour le définir il est nécessaire de se poser les trois questions suivantes : 1) quel est son mode d’appartenance à la conscience ? 2) comment se constitue-t-il ? 3) comment s’actualise-t-il lors de l’exécution ? Y répondre est une entreprise descriptive importante puisqu’il faut commencer un travail à propos de ce qu’on pourrait appeler un « objet intentionnel sonore ». Nous l’avons commencé voici quelques années lors d’un premier Master à Paris-Sorbonne IV sous la direction du Prof. Dominique Pradelle portant sur « L’interprétation comme double révélation du texte par l’interprète et de l’interprète par le texte » mais ce n’est encore que le début. L’exposé suivant ne fera donc que présenter une partie de nos recherches en cours. Nous nous appuierons sur nos derniers travaux qui consistaient à définir le chant intérieur d’abord dans sa généralité[5] et ensuite en tant que phénomène temporel[6], pour creuser ici le rapport entretenu avec la vie de la conscience et les courants de vécu. Nous avions eu l’occasion dans un précédent travail de nous pencher sur la question de l’interprétation comme traduction[7] ; nous y avions démontré tout d’abord que le travail du musicien consistait à se retourner sur la vie de conscience où se déployait le « chant intérieur » afin de faire de celui-ci la mesure de son exécution, et ensuite que c’était ce retournement même qui permettait à l’interprétation d’être une « exécution vivante » et non pas une « exécution mécanique ». C’est précisément la distinction entre ces deux types d’exécutions qui nous intéressera ici.
La question qui nous guidera sera la suivante : dans quelle mesure le mode spécifique d’appartenance du chant intérieur à la conscience peut-il être la cause de la vivacité de l’exécution ?
De même que nous nous étions appuyés plus particulièrement sur les Leçons pour une phénoménologie de la conscience intime du temps de Husserl dans notre précédent travail, nous nous appuierons ici essentiellement sur les Méditations cartésiennes de ce même auteur.
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Le chant intérieur vient s’installer dans la conscience par un processus de temporalisation au cours duquel s’effectue la transformation du signe en son, du donné visuel en donné auditif. En effet, il y a une différence de nature entre l’objet perçu et le datum temporel dans la conscience : l’objet appréhendé est une image, l’objet intentionnel est un son. Pour passer de l’un à l’autre il est nécessaire d’opérer une transformation, transformation qui a lieu lors de la perception même de l’objet par le sujet. Celle-ci est rendue possible grâce au savoir-faire du musicien qui possède la capacité d’association nécessaire. Cela se fait au cours du processus de lecture qui permet le déploiement du donné selon l’ordre de la succession. Ainsi, dans ce cas précis non seulement il y a une durée de la sensation, mais également une sensation de la durée : le donné se temporalise dans la conscience. Durant ce processus, ce qui était contenu dans la partition comme prescription est actualisé. Ainsi, le chant intérieur que le musicien entend, ressent, est bien une mélodie constituée de sons qui ont non seulement une hauteur, mais également une durée, une couleur, une intensité, une tonalité affective. C’est en raison de ces multiples dimensions qu’on peut à la fois le chanter, mais également le décrire par le biais de concepts, lui associer une couleur, une forme visuelle. Alors même qu’il ne l’est pas encore lorsqu’il est consigné dans la partition, le donné vient prendre vie dans la conscience grâce à ce processus de transformation. C’est ce qui fait dire au violoncelliste Pablo Casals : « Ce qu’il faut c’est rendre vivant ce qui est écrit, lui insuffler la vie et non éviter timidement cette vie. Aucune théorie, si savante soit-elle, aucune édition, aussi chargée d’annotations qu’on puisse la présenter, ne pourront remplacer cette interprétation, car l’âme d’un chant ne pourra jamais être mise sur papier »[8].
Dans la conscience le chant intérieur est ensuite donné à la fois comme un et multiple. En effet, bien que le donné n’ait pas été auditif dès le départ, on se trouve, grâce au processus de transformation présenté ci-dessus, dans la même situation phénoménologique que celle de la mélodie que décrit Husserl dans ses Leçons pour une phénoménologie de la conscience intime du temps. Voici ce qu’il affirme : « Que plusieurs sons successifs donnent une mélodie, c’est possible seulement parce que la succession des processus psychiques s’unifie « sans plus » pour former un ensemble. Ils sont l’un après l’autre dans la conscience, mais ils tombent à l’intérieur d’un seul et même acte d’ensemble. Ce n’est pas que nous ayons les sons d’un seul coup, ni que nous entendions la mélodie parce que dans le dernier son subsisteraient les sons précédents, mais les sons forment une unité successive avec un résultat commun, la forme de l’appréhension »[9]. Il y a donc unité temporelle malgré cette multiplicité successive. Comme tout donné temporel, le chant intérieur a un début, un développement et une fin, qui peuvent être compris en termes de naissance, vie, et mort. Mais il ne s’agit pas simplement ici d’une unité temporelle. En effet, il y a unification de la multiplicité également dans le sens où l’on appréhende l’objet par petites touches. Saisi une première fois lors du déchiffrage[10], il est ensuite visé une multiplicité de fois au cours d’une variation de perspectives. Celles-ci constituent tout de même dans la conscience une unité synthétique de multiplicité dont Husserl montre que : « Elle n’est pas une simple liaison continue de cogitationes pour ainsi dire extérieurement accolées les unes aux autres, mais elle est une unité de conscience une, et dans cette conscience se constitue l’unité d’une entité (Gegenständlichkeit) intentionnelle, précisément comme étant la même entité se présentant de manières variées et multiples »[11]. Le chant intérieur est donc une structure unifié qui unifie une multiplicité : il est donné comme un, et multiple à la fois.
Cette unité se fait par un « acte d’ensemble » intentionnel, qui vient donner sens. Mais comme dans ce cas précis il s’agit d’un processus herméneutique, on ne saurait dire que l’unité du chant intérieur ne vient pas du dehors. Le contenu de partition transmet déjà un sens, non pas en tant que texte, mais en tant que texte issu du chant intérieur du compositeur qui avait déjà du sens. Au cours de la lecture il y a un double mouvement qui recueille le sens, et donne sens. Tout d’abord il s’agit de lire la partition en comprenant la partie au regard du tout et le tout au regard de ce qui le compose, selon un « cercle herméneutique » : la partition respecte des règles, a sa propre structure qu’il est nécessaire d’étudier avant de jouer. Arrêtons-nous un instant sur ce « Prélude » de la quatrième Suite pour violoncelle seul de Bach. Au niveau rythmique, le Prélude a beau être une forme libre, on trouve tout de même deux motifs distincts : les quatre croches qui développent l’accord et qui s’élancent à partir des sons graves contigus, et les motifs lyriques en double croches au milieu et à la fin. Au niveau mélodique nous avons une tonalité générale en Mi bémol majeur avec une modulation importante en sol mineur dans la partie B et d’autres modulations moins importantes au milieu de la partie A. La compréhension de ce tout permet au musicien de mieux appréhender les parties, c’est-à-dire en fait, les transitions d’un élément à l’autre – travail de l’enchaînement des phrases musicales, et les cellules en elle-même – travail par mesure. Mais il ne s’agit pas simplement de comprendre le sens interne à la partition, le musicien est lui-même guidé par des « attentes de sens »[12] qui lui permettent de donner sens à ce qu’il lit. Il se confronte au choc de l’altérité du texte tout y en projetant sa propre vision. De cela dépend la cohérence du chant intérieur, c’est aussi ce double mouvement qu’exprime le chant intérieur. Autrement dit, pour être le chant intérieur de quelque chose, il doit être possible de retrouver la structure objective du texte – appelée aussi « carrure », et son remplissement subjectif – ce « projet » dont parlent les enseignants[13]. Tout cela se « tient » grâce à l’unité formelle temporelle, unité vivante du tout.
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Cette unité vient se constituer en tant que vie perceptive dont Husserl affirme : « [la vie perceptive c’est-à-dire la vie qui vit, qui pratique l’expérience]. Cette vie est continuellement là pour moi, j’en ai constamment la conscience perceptive dans un champ de perceptions présentes ; tantôt elle m’est présente dans son originalité la plus concrète, tantôt telles ou telles formes passées de cette vie me « redeviennent » conscientes par la mémoire, et ceci implique qu’elles me redeviennent conscientes comme « ces formes passées elles-mêmes ». Je puis à tout moment, dans la réflexion, diriger un regard de mon intention sur cette vie spontanée, saisir le présent comme présent, le passé comme passé, tels qu’ils sont eux-mêmes. »[14]. Le chant intérieur fait partie de cette vie non seulement parce que, comme nous l’avons vu précédemment, il est issu de la perception, mais parce qu’il est lui-même percevant. Ainsi la violoniste Dominique Hoppenot en parle-t-elle aussi comme d’une « oreille intérieure »[15]. Il est la capacité subjective d’entendre ce qui est écrit, et en tant que tel, est une toile de fond qui accompagne toutes les représentations de l’interprète. En ce sens on n’a pas le chant intérieur, il est à la conscience. Il ne constitue pas un souvenir qu’il s’agirait de rappeler le moment opportun – pendant le travail ou lors d’un concert par exemple, il n’est pas une donnée qui se présente à la conscience dans certaines occasions, il est là sans cesse. Preuve en est cette possibilité de rejouer quelque chose des années après l’avoir travaillée. D’aucuns diraient : « j’ai le morceau dans les doigts », ou bien alors « je m’en souviens bien ». Il ne s’agit pourtant pas d’une question de mémoire. Le chant intérieur ne peut jamais être oublié parce qu’il n’est pas de l’ordre du souvenir. La conscience est simplement dirigée, ou non, vers cette vie perceptive dont il fait partie, et qu’il ne quitte jamais.
En tant qu’il est entrelacé dans les cogitationes, « courant de conscience qui forme la vie de ce moi »[16] le chant intérieur n’est pas non plus une donnée qui appartient au monde. On peut donc se situer dans le cadre de l’épochê phénoménologique de Husserl. Pour cette raison lorsque le musicien travaille, il peut tout à fait porter son regard sur le chant intérieur uniquement, et c’est bien ce qui se passe lorsqu’on étudie « par cœur ». Ce travail qui se fait sans partition, s’appuie uniquement sur la présence de l’objet dans la conscience. Sa condition de possibilité est qu’il s’agisse bien d’une donnée phénoménologique, qui porte en elle son rapport au monde. L’objet réel et l’objet réal sont corrélés, reliés par la visée : le contenu de partition est toujours interprété, perçu comme chant intérieur, le chant intérieur est toujours visée d’un contenu[17], le contenu de partition. Compris de cette manière, il devient possible d’en parler en terme d’intentionnalité : « cette particularité foncière et générale qu’a la conscience d’être conscience de quelque chose, de porter, en sa qualité de cogito, son cogitatum en elle-même »[18]. Cette vie intentionnelle est propre à chaque sujet – en ce sens il ne saurait y avoir deux chants intérieurs identiques du même texte, et en même temps distincte de l’ego lui-même – sans quoi le chant intérieur ne pourrait être reconnu comme étant chant intérieur de quelque chose. Le rapport de l’ego au chant intérieur se fait selon le mode de la « conscience de » comme le montre Husserl : « Le cogito a conscience de son cogitatum non pas en un acte non différencié, mais en une « structure de multiplicités » à caractère noétique et noématique bien déterminé, structure coordonnée de façon essentielle à l’identité de ce cogitatum déterminé. »[19]. Ainsi donc, le chant intérieur est bien une structure, quelque chose d’immuable, de multiplicités, de quelque chose de muable. Son identité est à la fois fixe, et ouverte. Il contient à la fois l’objet visé, et l’acte qui le vise. Il perçoit et est percevant.
C’est cette distance du cogito à ses cogitationes qui rend possible pour l’ego de porter son regard sur cette vie intentionnelle. Mais il peut également ne pas le faire. On aura alors l’impression d’une exécution mécanique, sans vie, dans laquelle justement l’interprète ne s’implique pas. Loin d’en conclure à une absence de chant intérieur qui signifierait que l’objet n’a pas été perçu – ce qui est absurde car le musicien est justement en train de jouer quelque chose qu’il lit, il faut plutôt en déduire qu’il n’y a pas eu de retournement de l’ego sur cette vie. Ainsi, on ne saurait jamais dire qu’un musicien « n’a pas de chant intérieur ». S’il donne cette impression c’est simplement qu’il n’a pas fait cet acte de retournement. A l’inverse, lorsqu’il a lieu, et lorsque le chant intérieur plonge ses racines dans une vie intentionnelle riche[20], l’exécution en est alors transformée. « L’habitude du chant intérieur aide à « tout dire », à conduire les phrases jusqu’à leur terminaison extrême, et permet ainsi de les vivre à chaque instant, dans la plénitude du moment »[21] affirme Dominique Hoppenot. Elle montre ainsi que la vie provient bien directement du chant intérieur. Comme disait auparavant Casals, « l’âme ne saurait être mise sur papier ».
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Selon Husserl il faut comprendre la vie de la conscience comme un « horizon intentionnel dont le propre est de renvoyer à des potentialités de la conscience qui appartiennent à cet horizon même »[22]. Bien que le chant intérieur ne soit pas de l’ordre de la possibilité puisqu’il est déjà une vision, un type d’engagement dans le monde particulier, il conserve tout de même ce caractère d’ouverture. Il est modifié selon les nouvelles possibilités entrevues (le texte est à chaque moment perçu un peu différemment, l’appréhension du texte n’est plus la même des années après, les conseils reçus par un professeur peuvent la modifier, l’écoute d’une interprétation peut venir en bouleverser la conception originelle), sans perdre pour autant son caractère d’unicité, et surtout d’identité. En effet, il n’est jamais définitivement donné et, bien qu’il contienne une « structure de détermination »[23], il demeure en même temps indéterminé. Preuve en sont les enregistrements radicalement différents du même texte par le même musicien avec plusieurs années d’intervalles[24]. En tant qu’horizon, non seulement il est une ouverture de possibilités, mais il est un idéal perpétuellement repoussé : on n’atteint jamais la plénitude d’un chant intérieur. Il peut toujours être raffiné, enrichi. Naturellement, cette ouverture provient également, et surtout de l’ouverture de la vie intentionnelle elle-même qui est flux, mouvement gros du passé et en tension vers l’à-venir.
De par son ouverture même, le chant intérieur dépasse ce qui était donné dans la partition. Il n’est pas simplement une application des prescriptions contenues dans la partition, le fait même d’appartenir à la vie de la conscience lui donne quelque chose de plus. Ce sont des possibilités expressives, une tonalité affective particulières, une couleur de son que chaque musicien apprend à développer et qui est parfois reconnaissable entre mille. En ce sens le chant intérieur puise sa vivacité de la vie elle-même qui anime le musicien. Elle regarde la totalité de sa personne. C’est ce qui fait dire à Dominique Hoppenot : « L’interprétation est un problème de fond qui intéresse la formation totale de l’individu, son niveau affectif, intellectuel, culturel, son imagination créatrice, sa possibilité de vibrer physiquement »[25]. Tout cela participe de ce dépassement qui est appelé par Husserl : « dépassement de l’intention dans l’intention »[26]. Il ne pas pour autant en déduire que la partition soit originairement pauvre et que la richesse de l’œuvre n’arrive qu’avec l’appréhension par l’instrumentiste. Dans la mesure où le texte n’est qu’un moyen de transmission de « l’idée musicale » conçue par le compositeur, et qu’au-delà de ce qui est écrit c’est cette « idée » que l’instrumentiste vise, sa pauvreté n’est que relative[27]. Il y a une richesse qui lui préexiste et qu’elle contient en germe. Cependant, du sens transmis par le compositeur au sens appréhendé par l’instrumentiste – et ensuite à celui appréhendé par le spectateur, il y a nécessairement modification. « L’idée musicale » demeure à la fois identique et modifiée, mais elle fera l’objet d’un travail plus important plus tard.
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Le chant intérieur tel que nous venons de le décrire, comme vie dans la conscience, vient ensuite vivifier l’interprétation. C’est parce qu’il est toujours là comme « possibilité latente »[28], qu’il est le passage nécessaire qui unit le texte original de la partition avec son exécution, et parce que sujet effectue un acte de retournement sur cette vie intentionnelle, qu’il peut réellement y avoir interprétation musicale. Cette interprétation est vivante parce qu’elle porte la vie, parce qu’elle la transmet. Il est à la fois de l’ordre du vécu et de la vision. Profondément subjectif et pour cette raison unique, et en même temps objectif puisqu’il permet de redonner exactement ce qui était prescrit dans la partition.
Mais notre analyse ne saurait s’arrêter à ce point car, pour qu’il y ait cette vivification de l’exécution, il faut savoir accéder au chant intérieur. C’est tout l’enjeu du travail de l’interprète. C’est ce qu’il cherche à faire chaque jour lorsqu’il met sur pied son interprétation. Si au niveau musical la question est de savoir comment travailler, au niveau phénoménologique il faut se demander comment se fait l’accès à l’objet intentionnel sonore.
[1] Site du CEFEDEM
[2] GAGNEPAIN, Xavier, Du musicien en général…au violoncelliste en particulier, Paris, Cité de la musique, 2003, p.10
[3] CORREDOR, Juan-Maria, Conversations avec Pablo Casals, Paris, Albin Michel, 1955.
[4] Cette expérience avait servi de base à notre travail de M2 à Paris-Sorbonne IV sous la direction du Prof. Dominique Pradelle en 2009.
[5] Nous nous étions appuyés essentiellement sur ce que la tradition instrumentale en disait.
[6] Nous avions étudié le phénomène en nous appuyant presque exclusivement sur les Leçons pour une phénoménologie de la conscience intime du temps de Husserl.
[7] Cf. Article de candidature au Master Erasmus Mundus Europhilosophie 2009.
[8] CORREDOR, Juan-Maria, Conversations avec Pablo Casals, Paris, Albin Michel, 1955, p.246
[9] HUSSERL, Edmund, Leçons pour une phénoménologie de la conscience intime du temps, Tr. H. Dussort, Préface. G. Granel, Paris, PUF, 1964, 2002, sixième édition, (Epiméthée), p 34
[10] Ce qu’on appelle aussi « lecture à vue » est devenu en France une véritable discipline de conservatoire que Sloboda décrit dans L’esprit musicien, La psychologie cognitive de la musique, Bruxelles, Mardaga, 1985, p.127. Il s’agit pour l’instrumentiste de saisir dans l’instant la cohérence de ce qu’il lit en sachant établir les rapports nécessaires entre les différentes informations qu’il reçoit.
[11] HUSSERL, Edmund, Méditations cartésiennes, Introduction à la phénoménologie, Trad. G. Peiffer, E. Levinas, Paris, Vrin, 1947, 1992 (Bibliothèque des Textes Philosophiques), p79.
[12] GADAMER, Hans-Georg, Vérité et méthode, Trad. P. Fruchon, G. Merlio et J. Grondin, Paris, Seuil, 1996, deuxième édition, p.288.
[13] Cf Interview de Gagnepain.
[14] HUSSERL, Edmund, Méditations cartésiennes, Introduction à la phénoménologie, Trad. G. Peiffer, E. Levinas, Paris, Vrin, 1947, 1992 (Bibliothèque des Textes Philosophiques), p.44.
[15] « Celle-ci consiste à reproduire mentalement le discours musical, par la seule puissance d’évocation et de suggestion de l’image auditive. Elle nous permet d’élaborer nos intervalles, de les construire avant même de les jouer, de leur donner vie en nous, avant même de leur prêter une existence extérieure. Semblable en cela à la vue intérieure que l’on créé par la volonté en fermant les yeux, elle est indépendante de la perception auditive. Elle résulte d’une concentration qui nous permet de vouloir et d’entendre exactement ce que nous allons jouer et nous implique dans une disposition affective puissante vis-à-vis de la musique », HOPPENOT, Dominique, Le violon intérieur, Paris, Editions Van de Velde, 1981, p. 136.
[16] HUSSERL, Edmund, Méditations cartésiennes, Introduction à la phénoménologie, Trad. G. Peiffer, E. Levinas, Paris, Vrin, 1947, 1992 (Bibliothèque des Textes Philosophiques) p.63.
[17] . Pour cette raison on peut parler de l’un comme la traduction de l’autre, et dans la bonne interprétation on peut appliquer ce « principe de réversibilité » dont parle Umberto ECO dans Dire presque la même chose, expérience de traduction, Paris, Grasset, 2006 (Coll. Le livre de poche, Traduction Myriem Bouzaher), p. 72.
[18] HUSSERL, Edmund, Méditations cartésiennes, Introduction à la phénoménologie, Trad. G. Peiffer, E. Levinas, Paris, Vrin, 1947, 1992 (Bibliothèque des Textes Philosophiques), p.65.
[19] Idem, p.76.
[20] Il serait nécessaire de revenir sur cette idée de richesse de la vie intentionnelle. De quoi se nourrit-elle ? Comment pourrait-elle être pauvre ? Nous suggèrerions qu’elle s’enrichit notamment par la culture musicale, mais aussi par la capacité d’analyse, le degré d’émotivité, d’affectivité, d’empathie du sujet. C’est ce « champ intérieur » dont parle Dominique Hoppenot qu’il s’agit d’ouvrir (Cf, Le violon intérieur p.197).
[21] HOPPENOT, Dominique, Le violon intérieur, Paris, Editions Van de Velde, 1981, p.190.
[22] HUSSERL, Edmund, Méditations cartésiennes, Introduction à la phénoménologie, Trad. G. Peiffer, E. Levinas, Paris, Vrin, 1947, 1992 (Bibliothèque des Textes Philosophiques), p. 82.
[23] Idem, p.84.
[24] Nous pensons ici à ceux d’Anner Bylsma des Suites de Bach.
[25] HOPPENOT, Dominique, Le violon intérieur, Paris, Editions Van de Velde, 1981 p.182.
[26] HUSSERL, Edmund, Méditations cartésiennes, Introduction à la phénoménologie, Trad. G. Peiffer, E. Levinas, Paris, Vrin, 1947, 1992 (Bibliothèque des Textes Philosophiques), p. 86.
[27] La notion « d’idée musicale » constitue en elle-même un autre problème que nous ne traiterons pas ici mais qui parcours nécessairement tout travail sur le « chant intérieur » qui est un des « états » de cette idée.
[28] HOPPENOT, Dominique, Le violon intérieur, Paris, Editions Van de Velde, 1981, p. 198.